L’année 2019 a vu une deuxième vague de soulèvements de masse dans la région MENA (Afrique du Nord et Moyen Oorient), les femmes étant au premier plan des protestations du Soudan au Liban, soulevant des questions de chômage, d’inégalité, de corruption, d’instabilité politique et de violence ethnique/sectaire.

Les femmes se mobilisent

Il ne s’agit pas d’une célébration clichée de l’émancipation des femmes arabes. Le rôle central joué par les femmes dans ces bouleversements révolutionnaires – en tant que dirigeantes, organisatrices et mobilisatrices – ne peut être compris que comme un reflet de l’impact profond des crises économiques, sociales et politiques de la région sur leur vie et leurs moyens de subsistance. Pourtant, bien que les soulèvements aient suscité de grands espoirs de changement, l’année 2020 a marqué un arrêt brutal des mobilisations, la pandémie COVID-19 transformant nos vies dans tous ses détails.

Un aspect qui reste constant, bien que beaucoup moins médiatisé, est le fait que ce sont aussi les femmes qui ont été à l’avant-garde de la lutte contre la pandémie dans notre région. Alors que nos vies se transformaient, le travail de soins – principalement effectué par les femmes et d’autres groupes minoritaires – est devenu visiblement central pour notre survie. Les sociétés ont soudain compris que les infirmières, les sages-femmes, les travailleurs sociaux, les employés de maison, les femmes de ménage et les enseignants, mal payés, sont nos « travailleurs essentiels ». De plus, le travail reproductif non rémunéré effectué par les mères, les grands-mères, les sœurs, les tantes, etc. à la maison est devenu le principal moteur qui maintient les sociétés à flot pendant les périodes d’enfermement, d’enseignement à distance et de travail à domicile.

Les femmes au cœur de la vie sociale et politique

La nécessité d’une « approche féministe de l’économie politique » dans la région MENA

À la lumière des crises régionales les plus récentes et les plus anciennes, de nombreux mouvements et organisations féministes de la région MENA ont cherché à apporter une compréhension sexospécifique des catastrophes à multiples facettes que nous vivons. Et un domaine important qui attire davantage l’attention aujourd’hui est l' »approche féministe de l’économie politique ».

De nombreuses féministes appellent aujourd’hui à une approche plus intersectionnelle de nos expériences quotidiennes, fondée sur l’économie politique et axée sur une compréhension sexospécifique, afin de centrer la relation entre les sphères politique, économique et sociale. À cette fin, la Ligue a publié un guide de l’économie politique féministe qui cherche à soutenir les initiatives féministes dans l’adoption d’une telle approche dans leur travail et leur militantisme. Bien que le guide ne soit pas spécifique à la région MENA, il reste une ressource très utile.

L’adoption d’une « approche de l’économie politique féministe » pour la région MENA peut avoir une valeur ajoutée significative. Si l’économie politique féministe est pertinente pour toutes les sociétés, elle est particulièrement importante pour notre région pour deux raisons principales. Premièrement, la région MENA enregistre les taux d’inégalité et de chômage des jeunes les plus élevés au monde, la plupart des pays souffrant de ce que l’on appelle le « syndrome hollandais ». Deuxièmement, la plupart des pays de cette région sont soit des sociétés en guerre, soit des sociétés d’après-guerre. Ces deux raisons, souvent liées entre elles, ont eu d’énormes répercussions sur la vie des gens dans cette partie du monde.